Analyse Comparative - Proposition O035

Analyse juridique croisée avec la proposition de loi intégrale

Analyse comparative de la proposition O 035 (intégrale) et de la proposition de Mme Cécile Thiébault

(Axes : alignement avec le droit positif français, innovations, écarts, impact psychotraumatique, comparaison internationale)

Axe Ce qui est retenu de la proposition intégrale (O 035) Apports spécifiques de Mme Thiébault Implications pratiques pour les victimes
1. Alignement avec le droit positif français • Reconnaissance explicite des VSS (violences sexistes et sexuelles) conformément aux articles 222‑33‑2‑1 du Code pénal et aux dispositions de la loi du 9 mars 2021 relative à la lutte contre les violences faites aux femmes.
• Mention de la conformité aux normes internationales (Convention ONU CEDAW, Convention de Budapest, etc.).
• Intégration d’une procédure de « droit de la victime » (article 222‑33‑2‑2 du Code pénal) pour garantir la prise en compte de la souffrance psychologique.
• Intégration d’un cadre explicite de « psychotrauma‑informed care » (soins adaptés au traumatisme) qui n’est pas encore codifié dans le droit français.
• Proposition d’une « autorité de suivi psychologique » indépendante, rappelant les dispositifs de suivi en Espagne (Servicio de Atención a la Víctima).
• Les victimes bénéficient d’une reconnaissance juridique de leur souffrance psychologique, ce qui facilite l’accès aux soins, aux indemnités et à la protection judiciaire.
• La présence d’une autorité de suivi réduit le risque de re‑traumatisation lors des procédures judiciaires.
2. Éléments innovants par rapport au droit actuel • Suppression du concept de « syndrome d’aliénation parentale (SAp) » dans les procédures judiciaires, évitant l’usage d’un concept non reconnu par le Code civil et qui peut être source de partialité.
• Création d’un « registre national des VSS » pour la collecte de données statistiques (inspiration de la base de données de la CNIL).
• Mise en place d’un « parcours de soutien psychologique obligatoire » dès la prise en charge de la victime (inspiration des modèles nordiques).
• Introduction d’une « clause de non‑exclusion de la preuve » pour les témoignages de victimes, afin de limiter la présomption de non‑crédibilité.
• Les victimes voient leur témoignage valorisé et protégés contre la stigmatisation.
• Le registre permet une meilleure allocation des ressources et une évaluation continue de l’efficacité des mesures.
3. Analyse critique des écarts avec la proposition de Mme Thiébault • La proposition intégrale ne prévoit pas de mécanisme de « intervention préventive » (ex. pré‑conseil familial, médiation spécialisée).
• Absence d’une obligation de formation continue pour les juges et les procureurs sur les dynamiques de VSS et de psychotrauma.
• Mme Thiébault insiste sur :
 – une formation obligatoire de 20 h pour les magistrats et les procureurs (modèle de la Finlande),
 – la création d’une « commission d’experts en psychotrauma » pour accompagner les décisions de justice,
 – un dispositif de « suivi post‑judiciaire » (accompagnement à l’emploi, logement, santé mentale).
• Les écarts signifient que, sans la proposition de Mme Thiébault, les victimes peuvent rester sans soutien spécialisé après la décision de justice.
• La formation continue est cruciale pour éviter les biais de jugement et garantir la crédibilité des victimes.
4. Impact sur les victimes (approche psychotraumatique) • Intégration d’une reconnaissance juridique de la souffrance psychologique (article 222‑33‑2‑2).
• Suppression du SAp, évitant la pathologisation de la victime.
• Mise en place d’un « parcours de soins intégrés » (psychologue, psychiatre, travailleur social) dès la première prise en charge.
• Accès gratuit à des thérapies spécifiques (EMDR, thérapie cognitivo‑comportementale).
• Garanties de confidentialité renforcées (modèle de la Norvège).
• Réduction du risque de re‑traumatisation lors des procédures judiciaires.
• Amélioration des résultats de santé mentale à long terme (diminution de l’anxiété, de la dépression, de l’PTSD).
• Renforcement de la confiance dans le système judiciaire, ce qui encourage les victimes à porter plainte.
5. Comparaison avec les législations étrangères • Alignement avec les directives européennes (Directive 2011/83/UE sur la protection des victimes).
• Conformité aux principes de la Convention de Budapest (prévention, protection, assistance).
• Mme Thiébault s’inspire de modèles avancés :
 – Espagne : « Ley Orgánica 1/2021 » qui prévoit des tribunaux spécialisés, des mesures de protection immédiate et un suivi psychologique obligatoire.
 – Pays nordiques : systèmes de « société de soutien intégrée » (Finlande, Suède, Norvège) où les victimes bénéficient d’un accompagnement multidisciplinaire et d’une protection juridique renforcée.
• En France, l’intégration de ces pratiques permettrait de réduire les disparités entre les régions et de garantir un niveau de protection comparable à celui des pays leaders.
• Les victimes françaises bénéficieraient d’un accès plus rapide à des services spécialisés et d’une meilleure coordination entre les acteurs (justice, santé, services sociaux).

Synthèse des points clés

Point Résumé
Alignement La proposition intégrale respecte les fondements du droit français (Code pénal, Code civil, directives européennes) et reconnaît la souffrance psychologique des victimes.
Innovations Suppression du SAp, registre national des VSS, parcours de soutien psychologique obligatoire, clause de non‑exclusion de la preuve.
Écarts Manque de formation continue, absence de dispositif de suivi post‑judiciaire, pas de mécanisme d’intervention préventive.
Impact psychotraumatique Reconnaissance juridique du traumatisme, parcours de soins intégrés, garanties de confidentialité, réduction du risque de re‑traumatisation.
Comparaison internationale Modèle espagnol (tribunaux spécialisés, suivi psychologique obligatoire) et nordique (accompagnement multidisciplinaire, protection juridique renforcée) servent de référence pour compléter les lacunes françaises.

Recommandations pratiques

  1. Intégrer les dispositifs de formation continue (20 h minimum) pour les magistrats et les procureurs, afin de garantir une prise en compte adéquate des dynamiques de VSS et du psychotrauma.
  2. Mettre en place un dispositif de suivi post‑judiciaire (accompagnement à l’emploi, logement, santé mentale) inspiré des modèles finlandais et norvégiens.
  3. Créer une commission d’experts en psychotrauma pour accompagner les décisions de justice et assurer la cohérence des mesures de protection.
  4. Adopter un registre national des VSS pour collecter des données fiables et orienter les politiques publiques.
  5. Garantir l’accès gratuit à des thérapies spécialisées (EMDR, CBT) dès la première prise en charge, en collaboration avec les services de santé publique.

En suivant ces recommandations, la France pourra non seulement aligner son droit positif sur les meilleures pratiques internationales, mais aussi offrir aux victimes un cadre juridique et psychosocial réellement protecteur et adapté à leurs besoins.