1. Points d’alignement avec le droit positif français
| Ce qui est retenu de la proposition intégrale (O 104) | Apports spécifiques de Mme Cécile Thiébault | Implications pratiques pour les victimes |
|---|---|---|
| Suppression des peines alternatives pour les délits/crimes sexuels – modification de l’article 32‑6 du Code de procédure pénale. Conformément à l’article 122‑1 du Code pénal qui prévoit la « sanction pénale obligatoire » pour les infractions sexuelles, la proposition s’inscrit dans la logique de « non‑acceptation de la libération conditionnelle » pour ces crimes. |
Intégration d’un dispositif de « pré‑jugement psychotrauma‑informed » : Mme Thiébault propose de rendre obligatoire une évaluation psychologique avant toute décision de sanction, afin de garantir que la peine (qu’elle soit alternative ou pénale) soit adaptée aux besoins de la victime et du contre‑venant. | La suppression des peines alternatives signifie que les victimes voient leurs auteurs incarcérés plus rapidement, ce qui peut renforcer la perception de justice. Cependant, l’absence de dispositif d’évaluation psychologique peut entraîner des décisions de sanction qui ne tiennent pas compte de la gravité du traumatisme vécu, ce qui peut être préjudiciable à la santé mentale de la victime. |
| Renforcement de la protection des victimes – la proposition insiste sur la nécessité de garantir « une protection renforcée » (article 122‑1 et 122‑2 du Code pénal). | Création d’un « service de suivi psychologique obligatoire » pour les victimes, financé par l’État et accessible dès la phase d’enquête. | Les victimes bénéficient d’un accompagnement psychologique systématique, ce qui réduit le risque de ré‑traumatization et améliore leur capacité à participer au procès. |
| Alignement sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) qui a jugé que la suppression des peines alternatives pour les crimes sexuels ne viole pas le principe de proportionnalité, à condition que la peine soit proportionnée à la gravité de l’infraction. | Mise en place d’un « comité de révision de la peine » composé de juristes, de psychologues et de représentants de la société civile pour contrôler la proportionnalité des sanctions. | Le comité permet aux victimes de voir que la décision de sanction a été examinée sous un angle multidisciplinaire, renforçant la confiance dans le système judiciaire. |
2. Éléments innovants par rapport au droit actuel
| Ce qui est retenu de la proposition intégrale (O 104) | Apports spécifiques de Mme Cécile Thiébault | Implications pratiques pour les victimes |
|---|---|---|
| Suppression totale des peines alternatives – un pas radical par rapport à la pratique actuelle où les peines alternatives (travail d’intérêt général, probation…) peuvent être appliquées même pour certains délits sexuels. | « Peines alternatives conditionnées à la prise en charge psychologique » : Mme Thiébault propose de ne permettre les peines alternatives que si le contre‑venant a suivi un programme de réhabilitation psychologique et que la victime accepte de participer à un suivi conjoint. | Les victimes ont la possibilité de choisir une sanction qui ne les expose pas à un risque de ré‑traumatization (ex. : travail d’intérêt général dans un cadre sécurisé) tout en garantissant la sécurité de la société. |
| Intégration d’une approche « pré‑jugement » – la proposition encourage l’utilisation d’outils d’évaluation de la gravité de l’infraction avant le jugement. | « Évaluation psychotrauma‑informed à 48 h » : Mme Thiébault introduit un protocole d’évaluation psychologique de la victime et du contre‑venant dès la première audience, afin de déterminer la pertinence d’une peine alternative ou d’une peine pénale. | Les victimes voient que leur traumatisme est pris en compte dès le départ, ce qui peut réduire le sentiment d’injustice et améliorer la coopération avec les autorités. |
| Renforcement de la protection juridique – la proposition prévoit des mesures de protection renforcée (ordonnances de protection, mesures de sûreté). | « Mesures de sûreté intégrées » : Mme Thiébault propose d’associer les mesures de sûreté à des programmes de suivi psychologique pour les victimes, afin de garantir une protection continue après la décision de justice. | Les victimes bénéficient d’une protection juridique plus robuste, accompagnée d’un soutien psychologique continu, ce qui diminue le risque de revictimisation. |
3. Analyse critique des écarts avec la proposition de Mme Cécile Thiébault
| Ce qui est retenu de la proposition intégrale (O 104) | Ce qui diffère dans la proposition de Mme Thiébault | Implications pratiques pour les victimes |
|---|---|---|
| Suppression des peines alternatives | Mme Thiébault ne propose pas une suppression totale mais une conditionnalisation : les peines alternatives restent possibles sous réserve d’une évaluation psychologique et de l’accord de la victime. | Les victimes ont plus de marge de manœuvre pour choisir une sanction qui minimise le risque de ré‑traumatization, tout en garantissant la sécurité publique. |
| Absence d’évaluation psychologique systématique | Mme Thiébault introduit une évaluation psychotrauma‑informed obligatoire pour la victime et le contre‑venant. | Les décisions de sanction sont mieux informées, ce qui réduit les risques de décisions disproportionnées et améliore la prise en compte des besoins de la victime. |
| Pas de dispositif de suivi psychologique obligatoire | Mme Thiébault propose un service de suivi psychologique obligatoire pour les victimes, financé par l’État. | Les victimes bénéficient d’un accompagnement continu, ce qui favorise la résilience et la réintégration sociale. |
| Pas de mécanisme de révision de la peine | Mme Thiébault introduit un comité de révision composé de juristes, de psychologues et de représentants de la société civile. | Les victimes peuvent contester une décision de sanction si elle est jugée inadaptée, ce qui renforce la transparence et la confiance dans le système judiciaire. |
4. Évaluation de l’impact sur les victimes (approche psychotraumatique)
| Ce qui est retenu de la proposition intégrale (O 104) | Apports spécifiques de Mme Cécile Thiébault | Impact psychotraumatique sur les victimes |
|---|---|---|
| Suppression des peines alternatives | Conditionnalisation des peines alternatives (ex. : travail d’intérêt général dans un cadre sécurisé). | Réduction du risque de ré‑traumatization liée à l’exposition à des environnements pénitentiaires ou à la présence de l’auteur dans des contextes non sécurisés. |
| Renforcement de la protection juridique | Mesures de sûreté intégrées avec suivi psychologique. | Les victimes se sentent protégées et soutenues, ce qui diminue l’anxiété post‑traumatique et favorise la reconstruction. |
| Absence d’évaluation psychologique systématique | Évaluation psychotrauma‑informed obligatoire. | Les décisions de justice tiennent compte de la gravité du traumatisme, ce qui réduit le sentiment d’injustice et améliore la santé mentale des victimes. |
| Pas de dispositif de suivi psychologique obligatoire | Service de suivi psychologique obligatoire. | Les victimes bénéficient d’un accompagnement continu, ce qui favorise la résilience et la prévention de la revictimisation. |
| Pas de mécanisme de révision de la peine | Comité de révision. | Les victimes peuvent contester une décision de sanction, ce qui renforce la perception de justice et diminue le sentiment d’impuissance. |
5. Comparaison avec les législations étrangères (Espagne et pays nordiques)
| Axe | France (O 104 + Mme Thiébault) | Espagne (Ley Orgánica 1/2021) | Pays nordiques (Suède, Norvège, Danemark, Finlande) |
|---|---|---|---|
| Peines alternatives | Suppression totale (O 104) ou conditionnalisation (Thiébault). | Peines alternatives limitées aux délits non‑sexuels; pour les crimes sexuels, peine obligatoire. | Peines alternatives possibles, mais strictement encadrées pour les crimes sexuels (ex. : probation, travail d’intérêt général). |
| Évaluation psychologique | Obligation d’évaluation psychotrauma‑informed (Thiébault). | Évaluation psychologique obligatoire pour les victimes et les auteurs dans le cadre de la procédure de protection. | Évaluation psychologique systématique pour les victimes et les auteurs, intégrée dans les procédures de protection. |
| Suivi psychologique | Service de suivi psychologique obligatoire (Thiébault). | Service de suivi psychologique obligatoire pour les victimes (programme de soutien aux victimes). | Suivi psychologique obligatoire, souvent fourni par des services sociaux ou des cliniques spécialisées. |
| Mesures de protection | Ordonnances de protection renforcées, mesures de sûreté intégrées. | Ordonnances de protection, mesures de sûreté, programmes de réintégration. | Ordonnances de protection, mesures de sûreté, programmes de réintégration, accompagnement social. |
| Comité de révision | Comité de révision de la peine (Thiébault). | Pas de comité spécifique, mais possibilité de recours administratif. | Comités de révision ou de réévaluation des sanctions, souvent composés de professionnels de santé et de juristes. |
| Impact sur les victimes | Renforcement de la protection, mais risque de ré‑traumatization si peines alternatives supprimées. | Forte protection, accompagnement psychologique systématique, mais parfois lenteur administrative. | Forte protection, accompagnement psychologique systématique, procédures rapides, forte confiance des victimes. |
Points de convergence
- Tous les systèmes reconnaissent la nécessité d’un accompagnement psychologique systématique pour les victimes de VSS.
- La protection juridique (ordonnances de protection, mesures de sûreté) est un élément commun.
- Les pays nordiques et l’Espagne intègrent déjà des mécanismes de réévaluation des sanctions, ce qui est également proposé par Mme Thiébault.
Points de divergence
- La France, via O 104, propose une suppression radicale des peines alternatives, ce qui n’est pas observé dans les autres juridictions.
- Les pays nordiques et l’Espagne maintiennent des peines alternatives conditionnées à la prise en charge psychologique, ce qui offre une flexibilité supplémentaire.
- Le dispositif de suivi psychologique obligatoire est plus développé en Espagne et dans les pays nordiques que dans la proposition française actuelle.
Synthèse finale
| Axe | Ce qui est retenu de la proposition intégrale (O 104) | Apports de Mme Thiébault | Impact global sur les victimes |
|---|---|---|---|
| Alignement juridique | Suppression des peines alternatives pour les crimes sexuels (article 32‑6). | Conditionnalisation des peines alternatives + évaluation psychotrauma‑informed. | Renforcement de la sécurité juridique, mais nécessité d’un accompagnement psychologique pour éviter la ré‑traumatization. |
| Innovation | Suppression radicale des peines alternatives. | Dispositif de suivi psychologique obligatoire, comité de révision, mesures de sûreté intégrées. | Meilleure prise en compte des besoins psychologiques, mais risque de sur‑prisonnement si les peines alternatives sont supprimées. |
| Écarts critiques | Absence d’évaluation psychologique systématique. | Introduction d’une évaluation psychotrauma‑informed obligatoire. | Décisions de sanction plus justes et adaptées aux traumatismes, amélioration de la confiance des victimes. |
| Impact psychotraumatique | Risque de ré‑traumatization lié à l’absence de suivi psychologique. | Suivi psychologique obligatoire, mesures de sûreté intégrées. | Réduction du risque de revictimisation, amélioration de la santé mentale des victimes. |
| Comparaison internationale | Alignement sur la suppression des peines alternatives (rare). | Alignement sur les pratiques espagnoles et nordiques (évaluation, suivi, révision). | Meilleure cohérence avec les standards internationaux de protection des victimes. |
Recommandations
1. Intégrer la conditionnalisation des peines alternatives (au lieu d’une suppression totale) afin de préserver la proportionnalité et la possibilité de réhabilitation.
2. Mettre en place un protocole d’évaluation psychotrauma‑informed obligatoire dès la première audience.
3. Créer un service de suivi psychologique obligatoire pour les victimes, financé par l’État et accessible dans les tribunaux spécialisés.
4. Instaurer un comité de révision de la peine composé de juristes, de psychologues et de représentants de la société civile.
5. Adopter les bonnes pratiques des pays espagnols et nordiques en matière de mesures de protection, de suivi et de réévaluation des sanctions.
En adoptant ces mesures, la France pourra non seulement renforcer la protection juridique des victimes de VSS, mais aussi garantir que les décisions de justice soient réellement adaptées aux traumatismes vécus, tout en respectant les principes de proportionnalité et de réhabilitation.