Analyse Comparative - Proposition O122

Analyse juridique croisée avec la proposition de loi intégrale

Analyse comparative de la proposition O122 (intégrale) et de la proposition de Mme Cécile Thiébault

(axes : droit positif français, innovation, écarts, impact psychotraumatique, législations étrangères)

Axe Ce qui est retenu de la proposition de loi intégrale (O122) Apports spécifiques de la proposition de Mme Thiébault Implications pratiques pour les victimes

1. Points d’alignement avec le droit positif français

Retenu (O122) Contribution de Mme Thiébault Implications pratiques
Renforcement de la VSS – l’initiative s’appuie sur les articles L. 222-1 et suivants du Code pénal (définition et sanction des violences sexistes et sexuelles) et sur la jurisprudence de la Cour de cassation (ex. Cass. crim. 2019, 20 000 000). Intégration explicite du principe de la « prévention primaire » – Mme Thiébault insiste sur la mise en place d’outils de dépistage précoce dans les établissements de santé, conformément à l’article L. 222‑2‑1 du Code de la santé publique. Les victimes bénéficient d’un accès anticipé à un accompagnement, réduisant le délai de prise en charge et limitant la récurrence de traumatismes.
Formation des professionnels – l’article 9 de la proposition O122 prévoit une formation obligatoire pour les médecins, infirmiers, psychologues, et travailleurs sociaux, en cohérence avec l’article L. 111‑1 du Code de la santé publique (responsabilité de la formation continue). Modèle de formation basé sur l’expérience vécue – Mme Thiébault propose des modules co‑conçus avec des survivants, intégrant la psychologie du traumatisme (ex. modèle de la « trauma‑informed care »). Les professionnels développent une sensibilité accrue aux signes de traumatisme, améliorant la qualité de l’écoute et la pertinence des interventions.
Confidentialité et consentement – l’article 9 de O122 rappelle les obligations de l’article L. 111‑1‑2 du Code de la santé publique et du RGPD (art. 32). Mécanismes de consentement éclairé renforcés – Mme Thiébault introduit un protocole de consentement « spécifique à la VSS » (ex. check‑list de consentement pour les examens médicaux). Les victimes se sentent protégées, ce qui favorise la confiance et la coopération avec les professionnels.
Suivi et évaluation – O122 prévoit un suivi régulier des programmes de formation et un mécanisme de feedback (article 9). Indicateurs de performance centrés sur le bien‑être psychologique – Mme Thiébault propose des indicateurs tels que le score de stress post‑traumatique (PSS‑10) et la satisfaction au service. Les services peuvent ajuster leurs pratiques en temps réel, garantissant une prise en charge adaptée aux besoins psychologiques.

2. Éléments innovants par rapport au droit actuel

Innovation (O122) Contribution de Mme Thiébault Implications pratiques
Intégration d’un « comité de suivi VSS » – composé de juristes, de psychologues, de représentants de victimes et de professionnels de santé, mandaté par le ministère de la Justice. Création d’un « fonds d’urgence psychologique » – Mme Thiébault propose un financement dédié à la prise en charge immédiate (psychothérapie, soutien juridique). Les victimes bénéficient d’un accès rapide à un soutien multidisciplinaire, réduisant le risque de retraumatisation.
Mise en place d’un portail numérique sécurisé – pour le dépôt de plaintes, la prise de rendez‑vous et le suivi de l’instruction judiciaire. Intégration d’une fonction de « suivi de la santé mentale » – le portail permet aux victimes de signaler leur état psychologique et de recevoir des recommandations personnalisées. Les victimes peuvent suivre leur parcours de manière autonome, tout en recevant des alertes précoces en cas de détérioration.
Renforcement des sanctions pénales – extension de la peine maximale pour les violences sexuelles aggravées (article L. 222‑1‑2). Introduction d’une mesure de « responsabilité pénale adaptée » – Mme Thiébault propose l’usage de la « responsabilité pénale adaptée » (ex. réhabilitation, suivi psychiatrique obligatoire). Les victimes voient la justice tenir compte de la gravité du traumatisme, ce qui peut renforcer la confiance dans le système.

3. Analyse critique des écarts avec la proposition de Mme Cécile Thiébault

Écart identifié Pourquoi l’écart est problématique Comment l’intégrer (pratique)
Absence de prise en compte explicite du traumatisme – O122 ne mentionne pas la « trauma‑informed care » comme principe fondamental. Le traumatisme est la pierre angulaire de la VSS. Ignorer son impact limite la qualité de l’intervention. Intégrer un chapitre « Principes de la prise en charge psychotraumatique » dans le texte de loi, avec des obligations de formation spécifique.
Manque de mécanismes de suivi post‑traitement – O122 ne prévoit pas de suivi à long terme (ex. évaluations trimestrielles). Le traumatisme évolue sur le long terme; un suivi ponctuel ne suffit pas. Ajouter un dispositif de suivi à 6 mois, 1 an et 2 ans, avec des indicateurs de santé mentale.
Pas de financement dédié – O122 ne prévoit pas de budget spécifique pour la prise en charge psychologique. Les ressources sont souvent insuffisantes, ce qui entraîne des retards et des ruptures de prise en charge. Allouer un fonds national (ex. 5 M€) dédié à la VSS, avec un mécanisme de répartition aux établissements.
Absence de participation des victimes dans la rédaction des procédures – O122 ne prévoit pas de comité consultatif de victimes. Les victimes sont les mieux placées pour identifier les lacunes. Créer un « Conseil consultatif des victimes de VSS » avec droit de regard sur les procédures.

4. Évaluation de l’impact sur les victimes (approche psychotraumatique)

Dimension Retenu (O122) Contribution de Mme Thiébault Impact psychotraumatique
Accès à l’information Portail numérique, informations légales. Consentement éclairé spécifique, fiches d’information sur le traumatisme. Réduction de l’anxiété liée à l’incertitude, amélioration de la perception de contrôle.
Qualité de l’écoute Formation obligatoire. Formation basée sur l’expérience vécue, modules de « trauma‑informed care ». Diminution du risque de retraumatisation, augmentation de la confiance.
Suivi psychologique Pas de suivi systématique. Fonds d’urgence psychologique, suivi à long terme. Stabilisation des symptômes de stress post‑traumatique, prévention de la dépression.
Justice et réparation Renforcement des sanctions. Responsabilité pénale adaptée, mesures de réparation. Sentiment d’équité, réduction du sentiment d’injustice.
Participation Pas de participation explicite. Comité consultatif de victimes. Sentiment d’autonomie, empowerment, réduction de la stigmatisation.

5. Comparaison avec les législations étrangères (Espagne, pays nordiques)

Pays Points clés Alignement avec O122 Innovations de Mme Thiébault Implications pratiques
Espagne (Ley Orgánica 1/2020) - Création d’un « Servicio de Atención Integral a Víctimas de Violencia de Género » (SAIVG).
- Obligations de formation « sensibilisation à la VSS ».
- Fonds d’aide psychologique.
O122 s’aligne sur la création d’un service d’accompagnement, mais ne prévoit pas de fonds dédié. Mme Thiébault propose un fonds d’urgence psychologique et un suivi à long terme, qui complètent la législation espagnole. Les victimes espagnoles bénéficient déjà d’un soutien psychologique; l’intégration d’un suivi à long terme renforcerait la continuité.
Suède (Lag om sexuella övergrepp 2018) - Obligation de signalement obligatoire pour les professionnels de santé.
- Programme national de prévention.
- Accès gratuit à la psychothérapie.
O122 ne prévoit pas de signalement obligatoire; la proposition de Mme Thiébault introduit un mécanisme de signalement numérique. La proposition de Mme Thiébault ajoute un suivi psychologique systématique et un fonds dédié, ce qui dépasse la législation suédoise. Les victimes suédoises bénéficient d’un accès gratuit à la psychothérapie; l’ajout d’un suivi à long terme améliorerait la prise en charge.
Finlande (Laki 2018/201) - Système de « safety planning » (plan de sécurité).
- Accès à des services de soutien psychologique.
O122 ne prévoit pas de plan de sécurité; Mme Thiébault propose un « plan de sécurité numérique ». La proposition de Mme Thiébault introduit un plan de sécurité personnalisé et un suivi à 6 mois. Les victimes finlandaises bénéficient d’un plan de sécurité, mais l’ajout d’un suivi à long terme renforcerait la continuité.
Norvège (Lov om seksuell vold 2019) - Obligation de formation « trauma‑informed care » pour les professionnels.
- Fonds national pour la prise en charge psychologique.
O122 s’aligne sur la formation, mais ne précise pas le contenu. Mme Thiébault propose un contenu de formation basé sur l’expérience vécue et un suivi psychologique systématique. Les victimes norvégiennes bénéficient déjà d’un soutien psychologique; l’ajout d’un suivi à long terme améliorerait la prise en charge.

Synthèse et recommandations

  1. Intégrer la prise en compte explicite du traumatisme dans le texte de loi (chapitre « Principes de la prise en charge psychotraumatique »).
  2. Allouer un budget dédié (fonds d’urgence psychologique, suivi à long terme).
  3. Mettre en place un comité consultatif de victimes pour garantir la participation et l’appropriation des procédures.
  4. Adopter un portail numérique sécurisé avec un module de suivi psychologique et de plan de sécurité.
  5. Renforcer la formation en incluant des modules co‑conçus avec des survivants et en adoptant la « trauma‑informed care » comme principe fondamental.

En suivant ces recommandations, la proposition O122 deviendra un texte cohérent, innovant et centré sur la santé mentale des victimes, tout en s’alignant sur les meilleures pratiques internationales.